30 avril 2012

Compte-rendu des débats du grenelle des mobilités à mi-parcours.

 
Pour votre information, voici le compte-rendu officiel de la plénière de mi-parcours du Grenelle des Mobilités Métropolitaines qui s'est déroulée le 5 avril dernier et qui s'est tenue dans les locaux de la faculté de Bordeaux.
Je vous ai reproduit ci-dessous in extenso le sous-chapitre concernant l'atelier qui nous intéresse tout particulièrement, à savoir celui sur les "grands déplacements", rempli de pro-CAB et ce jusqu'à sa présidente (voir article précédent) ...

4. Synthèse de l’avancée des travaux de trois ateliers thématiques par les binômes Président/Rapporteur
4.1 Les grands déplacements par Nicole PIZZAMIGLIA et Guillaume POUYANNE
Les points de consensus
- La Garonne et le port sont sous-exploités.
- Les dessertes ferroviaires sont mal utilisées.
- L’aéroport est mal desservi.
- Beaucoup de territoires sont encore enclavés.
- Les camions transitant sur la rocade sont de plus en plus nombreux, tout comme les touristes à Bordeaux.
- Les contraintes sur le transport de marchandises sont fortes : 7 900 camions circulent sur la rocade tous les jours, probablement 9 000 en 2020.
- Le développement du covoiturage se heurte aux réticences au changement.
- Les péages urbains fonctionnent plutôt bien à Londres et à Stockholm, mais ce n’est pas le cas partout.
Les points de dissensus
- S’agissant du grand contournement, ses partisans ont souligné les avantages économiques qu’il pourrait présenter (meilleur accès au port, etc.) alors que ses détracteurs ont rappelé que les véhicules en transit sur la rocade, camions compris, ne représentent pas plus de 8% du trafic journalier et qu’il n’est donc pas nécessaire.
- Ce débat reflète deux visions : certains adoptent une vision quantitative visant à accroître les capacités d’accueil des infrastructures existantes comme la rocade alors que d’autres défendent une vision plutôt qualitative avec une optimisation de leur utilisation.
Les orientations
- Encourager le covoiturage pour lutter contre la congestion en créant soit une voie réservée sur la rocade par exemple, soit des péages urbains.
- Optimiser l’utilisation des infrastructures existantes en favorisant l’intermodalité que ce soit pour les déplacements de personnes ou de marchandises.


Au final, on remarque que les "points de consensus" annoncés ne sont consensuels que du côté des pro-contournement et on voit la très grosse ficelle du Port et de l'Aéroport (on lit entre les lignes l'idée d'une jonction) et de l'enclavement supposé de "beaucoup de territoires" (??) qu'on imagine situés entre les deux. Comme par hasard, cela tombe pile sur un tracé bien connu souhaité par la CCI (propriétaire des deux lieux) ...
Autre cas classique, les flux de camion qui inexorablement augmentent et illustré par les projections pour 2020 (projections au passage très fortement revues à la baisse par rapport au rapport d'étude d'avant projet qui les chiffrait à 20 000 par jour !). Personne n'est en fait capable de donner des chiffres fiables pour dans une dizaine d'année, encore moins avec la crise espagnole et l'explosion du coût des carburants. Mais 9000 ça fait bien. Et surtout car ça fait plus.
Et le "consensus" de conclure que le covoiturage ne marcherait pas et que le péage sur la rocade non plus.
Du bel ouvrage ...

Côté "dissensus" (sic), on remarque d'emblée que les arguments anti-CAB ont été plus que ramenés à la portion congrue !! En gros, des avantages économiques quasi évidents face à un ouvrage ne concernant prétendument qu'une faible part des flux (je dit bien prétendument car vous avez remarqué que cela ne figurait pas dans la partie consensus ....). Le chiffre de 8% est crédible (Vincent Feltesse a parlé lui de 15%, très exagéré à mon sens), mais des arguments clé ont été omis dans ce rapport malgré les interventions incessantes de la représentante de la coordination incontournable dans cet atelier (voir article sur la composition des ateliers).

Le rapport d'étape aurait pu rappeler entre autres les argument suivants :
  • un projet de contournement à péage que personne n’empruntera ou presque (argument rendu encore plus crédible vu l'échec constaté par tous de la portion Langon-Pau de l'A65) ;
  • un coût de plusieurs milliards d'euros qui en feront l'un des plus cher de France (sinon le plus cher) : qui paiera la facture ? Et les pertes d'une exploitation non rentable ?
  • un projet faramineusement gourmand en graves et sables pour sa construction alors que la gironde est déjà ultra déficitaire en granulats (avec pour conséquence l'ouverture de gravières au-delà du raisonnable, une explosion du la tonne de grave pour la construction des autres infrastructure, des habitations et autres équipements utiles, un flux de transport de matériaux inégalé en centaines de camions jour supplémentaires !!) ;
  • un projet évidemment favorable au transport routier et donc porteur de davantage de pollution et d'émission de GES favorisant le réchauffement climatique, allant totalement à l'encontre des objectifs du Grenelle de l'environnement (argument massue, origine de son abandon par l'Etat, et ni avancé dans les consensus, ni les dissensus. Etrange non ?),
  • un projet destructeur de l'environnement, qui réduira la capacité des zones humides traversées à protéger l’agglomération bordelaise des crues et inondations, en plus de réduire la biodiversité locale ;
  • projet inutile qui ne produira aucun désenclavement de quiconque et qui favorisera l'étalement urbain ;
  • Enfin et surtout, comme l'avait la DRE en son temps, un projet qui n'a jamais été prévu pour désengorger la rocade dont la saturation provient du trafic local interurbain et non du trafic de transit ! 

Mais qui sait ? Le rapport final reprendra peut-être ces éléments complémentaires ...


21 janvier 2012

Grenelle des Mobilités : groupe de travail sur mesure pour les pro-contounement !

 Sous l'égide des quatre grandes collectivités locales (CUB, CRA, CG33, Mairie de Bordeaux) et de l'Etat, le Grenelle des Mobilités Métropolitaines s'organise pour le lancement de ses travaux visant à "trouver des solutions innovantes" pour répondre au "phénomène de congestion". Ce grenelle compte y parvenir en permettant de "mener un travail de co-production qui précisera les conditions et les projet partenariaux nécessaires à une rupture dans les manières de pratiquer et d'organiser la mobilité dans les territoires de la métropole".

Ce processus commencera ce mois de Janvier 2012 (avec une première réunion jeudi 26/01 de 10h30 à 12h30 à la Fac de Droit place Pey Berland) et son rapport devrait être rendu "à l'horizon de l'été 2012".
La coordination incontournable a réussi à se faire une place dans le groupe de travail le plus important à nos yeux, à savoir le groupe "grands déplacements".   Et la liste des membres de ce groupe de travail en dit long sur les conclusions à venir ... puisqu'il n'est composé quasiment qu'exclusivement de personnes représentant ou ayant représenté des institutions pro-contournement, et ce jusqu'à sa présidente ! 

Voici en exclusivité la composition de l'atelier "grands déplacement" ... avec en prime et en jaune, ceux qui se sont ouvertement favorables à l'ex-projet de contournement ou qui se sont positionné pour à à moment donné, et en bleu les ouvertement contre. Pour les autres, je n'ai pas d'information (mais vous pouvez m'en fournir !) ...
Sous la direction d'une présidence et dotée d'un rapporteur, les membres du groupe de travail sont répartis en cinq catégories :
  1. l'Etat. 3 représentants pour la Dreal (le ministère des transports, antenne aquitaine), la Ddtm (CG33...), la Dira (Direction interdépartementale des routes), le Cete, l'Ademe, Euratlantique (donc la CUB), RFF, PBA, ...
  2.  les Collectivités locales. 4 représentants (un pour chacune : CG33, CRA, CUB et Mairie de Bordeaux, et donc porteur de la parole de M Alain Juppé)
  3. les Entreprises. 8 représentants : la CCI, l'Aéroport de Bordeaux (dépendant de la CCI ...), l'Union Portuaire (Le Port Autonome de Bordeaux a été favorable au projet), CIJA (?? impossible de savoir qui est derrière cet acronyme), l'UIMM, Cap Entrepreneur, Chambre des métiers et encore un autre pour la CCI.
  4.  Syndicats et vie sociale. 5 représentants : CGT et CFTC, le CREAQ  + 2 "citoyens" (inconnus pour moi)
  5. Association Environnement + usagers de la mobilité. 2 représentants : Mme Paris de l'association  DURRABLE et Mme Colette Arnaud du Collectif Bordeaux Incontournable
  6. groupe "Experts".  7 représentants : la SNCF, la FNTR, les ASF, SYSTRA, GEODIS, 1 retraité = Pierre BAILLET, ex-responsable des études transports au CETE du SO, Centre d'Etude qui a réalisé le dossier technique du projet et celui de l'A65, et enfin, M Sanabria, DGS de la Communauté de Communes Portes de l’entre deux mers (Latresne, Cenac, Quinsac, St Caprais, ...) (aucun avis sur la position de ce monsieur)
  La présidence de cet atelier est donnée au "Collège Entreprises" sous l'égide de madame Nicole Pizzamiglia, présentée comme membre du Certa.
Le rapporteur sera le "Collège expert" sous l'égide de M G Pouyanne (maître de conférence en Sciences Economiques - Gretha)
 
QUE DE JAUNE DANS CET ATELIER !!!
Sur 31 membres, 20 soutiennent ou ont soutenu le contournement autoroutier de Bordeaux !! Et encore, c'est un minimum car je n'ai pas d'information sur une dizaine de membres ! Deux-tiers de pro CAB au moins ... face à un unique représentant de la coordination  !

Et quelle est la feuille de route de cet atelier ? Répondre notamment aux trois premières questions suivantes :
- Comment les flux économiques de transit peuvent-ils retrouver une capacité à traverser aisément l’agglomération en évitant les conflits d’usages avec les flux locaux de déplacements ? (vous remarquez comme la phrase sous-entend très subtilement le mode routier ?)
- Comment diminuer l’incidence des poids lourds sur la rocade ? (là encore, la question sous-entend que la rocade est congestionnée par les poids lourds et non les voitures, alors que ce n'est pas le cas)
- Comment réduire la dangerosité, les accidents ? (vous reconnaissez ici l'argument principal de la construction de l'A65, autoroute dont on reconnait aujourd'hui qu'elle n'auraot jamais dû voir le jour ...)

Cela sent très clairement le paquet préparé à l'avance ...

D'autant plus que les pro-CAB se réservent des places de choix :
- La présidence : quasiment 100% pro-contournement, dont sa présidente, présentée comme "CERTA" (déjà pro-cab), mais surtout ex vice-présidente de la CCI et représentante des entrepreneurs de la Haute-Gironde, proche de l'association Durrable et ouvertement pro-contournement (lire cet article édifiant à son sujet dans le magazine Haute-Gironde - lire le milieu de l'article) !
- Le groupe rapporteur : son rapporteur principal n'est pas à ma connaissance estampillé pro-contournement et je ne lui ferai pas de procès d'intention, en revanche, il sera sévèrement encadré par le groupe "Expert", qui est chargé de la rédaction du rapport final,  composés pour bon nombre de transporteurs routiers et 4 membres sur les 7 dépendent ou ont dépendu d'institution soutenant ou ayant soutenu le projet.



On peut éventuellement imaginer que le CREAQ, centre régional d'écoénergétique d'aquitaine, association dont l'objet est la maîtrise de l'énergie et le renouvelable ayant reçu le soutien d’associations ayant lutté contre le projet, serait plutôt hostile à une solution autoroutière. Mais tout ceci paraît au final avoir été bien orchestré et les conclusions de cet atelier "grands déplacements" aux questions qui leur ont été (im)posées paraissent en l'état jouées d'avance et,  même si la représentation de la coordination aura l'occasion de développer ses imparables arguments, le poids des lobbies va être difficile à surmonter. La composition de cet atelier doit donc être revue si l'on souhaite pouvoir accorder un quelconque crédit à ses recommandations.